Peer Learning Meeting Entreprises et Droits humains: Responsible Mining
Le 25 octobre 2024, le ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement et l’Institut fédéral pour le développement durable (IFDD) ont organisé une réunion de « peer learning » réunissant des expert·es internationaux·ales, des représentant·es diplomatiques, la société civile et des dirigeant·es du secteur privé pour discuter de l’évolution du paysage des entreprises et des droits humains. L’IFDD a chapeauté une discussion sur l'exploitation minière responsable, intitulée « Responsible Mining : From Myth to Reality ».
Critical Raw Materials Act
Le dérèglement climatique représente la plus grave crise de notre époque et la situation évolue encore plus rapidement qu’escompté. Pour faire face à ce défi, il est plus que jamais urgent de déployer à grande échelle les énergies renouvelables, comme l’éolien et le solaire, et les nouvelles formes de mobilité, comme les véhicules électriques. Cependant, les technologies liées à cette transition énergétique nécessitent des quantités énormes de matières premières telles que la bauxite, le cobalt, le cuivre, le lithium, le manganèse, le nickel et le zinc. Cette situation augmente la pression sur l'extraction toujours plus importante de ces minéraux, ce qui ne reste pas sans conséquences pour l'humain et l'environnement.
Afin de répondre à ce besoin urgent, l’Union européenne a adopté une législation sur les matières premières critiques, le Critical Raw Materials Act. Cette loi vise à renforcer la capacité de l’Europe à extraire, traiter et recycler des matières premières essentielles sur son territoire, tout en réduisant la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement. Par cette approche, l'Europe entend garantir un approvisionnement stable et à long terme en matières premières essentielles nécessaires à ses industries.
Bien que l’augmentation de la demande de ces matières premières soit cruciale pour construire un avenir durable, elle engendre également des défis considérables en termes d’impact environnemental, de conditions de travail et de droits humains. La directive sur le devoir de vigilance des entreprises est récemment entrée en vigueur et encourage les entreprises à prendre leurs responsabilités dans une transition juste vers une économie durable. L’objectif étant que les entreprises prennent leurs responsabilités dans les chaînes d'approvisionnement internationales et contribuent à mettre en œuvre des pratiques minières loyales.
Les défis de l'exploitation minière responsable
La transition énergétique est indissociable des métaux critiques. C'est la principale conclusion d'un récent rapport de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Pour réussir la transition vers une économie neutre pour le climat, le déploiement à grande échelle de technologies telles que le transport électrique, les éoliennes à propulsion directe et les panneaux photovoltaïques est essentiel. Mais ces innovations dépendent fortement de matières premières critiques comme le lithium, le nickel, le cobalt et les terres rares.
Les chiffres ne mentent pas : la demande en lithium devrait être multipliée par 42 au cours des vingt prochaines années, tandis que la demande en nickel et en cobalt devrait être environ multipliée par 20. Pour les terres rares, on table sur une multiplication par 7. Ces augmentations nous mettent face à un défi énorme : où trouver ces métaux ?
Pendant sa présentation, Peter Tom Jones, le directeur de SIM² (KU Leuven Instituut voor Duurzame Metalen en Mineralen), a tenté de répondre à cette question. Ce faisant, il a soulevé plusieurs options stratégiques. L’addition complexe de l’augmentation de la demande, de la disponibilité limitée et des contraintes de temps s’érige comme l'un des principaux obstacles à la transition énergétique.
Un moyen efficace de réduire la dépendance à l'égard de nouvelles ressources est de parvenir à gérer la demande. L'utilisation plus efficace de matériaux et de technologies nécessitant moins de métaux permettrait de réduire considérablement la demande en matières premières primaires.
Si la réutilisation des métaux critiques des produits en fin de vie est essentielle, elle ne sera pas suffisante pour résoudre le défi actuel. Le recyclage est un processus long à mettre en place et ne peut réellement contribuer à la réduction de la demande qu'après plusieurs années, car les produits utilisés aujourd'hui ne seront disponibles pour le recyclage qu’ultérieurement.
Même en réduisant la demande et en recyclant de manière intelligente, le besoin de nouvelles extractions demeure important. Deux options s’offrent à nous : l’extraction de métaux au niveau local permettrait à l'Europe de réduire une partie de sa dépendance aux sources extérieures. Toutefois, cela requiert des investissements considérables et une acceptation de la société. Les importations de métaux et de produits intermédiaires issus de mines gérées de manière responsable restent cruciales dans le monde entier. Cela requiert des contrôles stricts de l'impact environnemental et social.
Discussion avec les parties prenantes
La présentation a servi de point de départ à la discussion entre les différentes parties prenantes. Pendant la séance, une table ronde a été organisée, au cours de laquelle plusieurs parties prenantes ont présenté leurs points de vue sur les défis liés à l’exploitation minière responsable et aux chaînes d’approvisionnement en matières premières critiques. Cette approche multipartite a permis d’aborder certains aspects sous différents angles :
- Les syndicats : IndustriALL Global Union, représenté par Peter Froven, a mis en lumière l'impact de l'industrie minière sur les droits des travailleur·euses et la nécessité de disposer de conditions de travail sûres et équitables.
- Les ONG : l'institut de recherche indépendant IPIS (« International Peace Information Service ») était représenté par Filip Reyniers, qui a évoqué les questions éthiques et les risques pour le secteur minier international.
- Les entreprises minières : Rio Tinto, représenté par Jonathan Vanherberghen, a exposé un aperçu de la manière dont les grandes entreprises minières gèrent les attentes croissantes en matière de durabilité et de pratiques minières responsables.
- Comprehensive standard for responsible mining : The Initiative for Responsible Mining Assurance (IRMA), représentée par Cecilia Mattea, a partagé son point de vue sur le rôle de la certification indépendante et de la transparence dans le secteur minier.
Les questions éthiques liées à l'extraction de matières premières critiques ont été abordées. La question de savoir comment respecter les droits humains, dans un contexte où la pression sur ces matières premières augmente, était centrale. Voici quelques sujets importants abordés :
- Qu’entend-on par « exploitation minière responsable » ? L'exploitation minière comporte inévitablement des risques, tels que des impacts sur l'environnement et les communautés locales.
- Quels sont les critères pour rendre l'exploitation minière « responsable » ?
- Comment rendre une exploitation minière responsable ?
- Existe-t-il de bons exemples d’entreprises minières qui respectent les intérêts humains et de la nature ?
Initiative for Responsible Mining Assurance (IRMA)
Au cours de la discussion, Cecilia Mattea de l’ Initiative for Responsible Mining Assurance (IRMA) a souligné l'importance de la certification indépendante dans le secteur minier. L’IRMA propose un label de qualité indépendant qui réalise des audits sur les projets miniers, dans le but de promouvoir la transparence et la responsabilité au sein du secteur.
L'IRMA utilise un système de certification évolutif, qui commence par le niveau de transparence de base et progresse pour atteindre IRMA50, IRMA75 et finalement IRMA100 ; chaque niveau établissant des normes plus élevées en termes de performances sociales et environnementales. Cette approche peut aider les entreprises minières à améliorer continuellement leurs pratiques. De plus en plus d'experts voient dans l'IRMA un outil pour stimuler l'exploitation minière responsable dans le secteur, en Europe et dans le monde.
Vers un avenir juste et durable
Il est évident que le monde est confronté à un défi complexe. La demande en matières premières critiques continue d'augmenter, ce qui implique la nécessité d'adopter des pratiques minières responsables. L'engagement de l'Europe à protéger son approvisionnement en matières premières par le biais d'une législation comme le Critical Raw Materials Act, tout en respectant les droits humains et la durabilité via les directives de devoir de vigilance, constitue un pas dans la bonne direction.
Toutefois, la garantie de pratiques minières responsables exigera un effort concerté de la part des décideurs politiques, des entreprises et de la société. Ce n'est qu'en unissant nos forces que nous pourrons garantir que la transition énergétique ne se fera pas aux dépens de l'humain et de l'environnement.
La création d'une plateforme de dialogue spécifique est une première étape indispensable. Cette plateforme devrait faire office de forum pour des discussions ouvertes entre les communautés, les entreprises, les autorités publiques et les autres parties prenantes. Avec quel objectif ? Renforcer la confiance et obtenir un consensus communautaire (« community consent ») pour les projets miniers. Seuls un véritable engagement et un processus décisionnel partagé permettront de mener à bien des projets viables socialement et économiquement sur le long terme.
Par ailleurs, il est nécessaire de disposer d’un cadre international de normes partagées permettant de définir et de promouvoir l'exploitation minière responsable. Les directives de l'OCDE offrent un point de départ intéressant, à condition qu'elles soient suffisamment ambitieuses. Ce cadre devrait aider les entreprises à agir de manière durable, tout en établissant des conditions de concurrence équitables afin d’assurer une concurrence loyale. Grâce à des normes claires et ambitieuses, nous serons dans de bonnes conditions pour assurer une cohérence et des normes éthiques élevées dans l'ensemble de l'industrie.
Ces mesures permettent d’ériger une culture de la transparence, de l’inclusion et de la durabilité, qui profite tant aux communautés qu’aux entreprises. L'exploitation minière responsable ne sera alors pas uniquement une transformation technique, mais aussi une transformation sociale et éthique.
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Présentation – Responsible Mining: From Myth to Reality
One-pager – Responsible Mining: From Myth to Reality