Rikolto est une de SDG Voices 2019
Les SDG Voices braquent les projecteurs sur les objectifs de développement durable. En 2019, six nouvelles organisations porteront ce titre. Rikolto est l’une d’elles. Nous avons rencontré la coordinatrice de Rikolto, Hannelore Tyskens, afin d’en savoir plus sur leurs projets en tant que SDG Voice.
IFDD : Pourriez-vous nous expliquer en deux mots dans quel domaine Rikolto est actif ?
Hannelore Tyskens : « En espéranto, Rikolto signifie ‘récolte’. Cela résume bien nos activités : d’une part, nous coachons les agriculteurs pour qu’ils obtiennent une meilleure récolte en cultivant de manière efficace et respectueuse de l’environnement et en devenant des partenaires commerciaux de qualité. D’autre part, nous récoltons avec des agriculteurs, des entreprises, des scientifiques, les pouvoirs publics et des consommateurs de nouvelles idées pour faire des affaires de manière plus équitable dans le secteur de l’alimentation. Parce qu’un monde meilleur, ça commence dans notre assiette.
Et c’est littéralement ce que nous pensons. L’impact de notre système alimentaire sur la santé, le climat, l’économie et la société est gigantesque. Les agriculteurs qui ne peuvent plus vivre de leur métier, la pénurie en nourriture et les variations de prix, la déforestation et la pénurie en eau. Voilà les chevaux de bataille de Rikolto. Et pas à petite échelle ; notre ambition est grande et mondiale. Rikolto s’attelle à tous les aspects du système alimentaire : de la production durable de nourriture, à une offre de qualité dans les supermarchés en passant par un revenu équitable pour les agriculteurs. Rikolto construit des ponts entre les entreprises, les pouvoirs publics, les universités, les institutions financières, les consommateurs et les organisations d’agriculteurs. Nous semons et récoltons, ensemble, des solutions structurelles pour qu’à terme le choix le plus durable soit également le choix le plus évident, pour nous tous. »
« Toute la bonne volonté du monde se heurte encore à la dure réalité économique. Tant que les clients ne demandent pas de produits plus durables, un distributeur ne prendra pas le risque d’étendre cette offre »
IFDD : Pour Rikolto, c’est quoi exactement la « nourriture durable » ?
Hannelore Tyskens : « Nous partons d’une définition vaste de ‘durable’ : bon pour l’humain et la planète, aujourd’hui et demain. Comment traduire cela dans les faits ? L’alimentation est une problématique très complexe puisque les frontières ne sont pas toujours très simples ni strictes pour savoir ce qui est durable et ce qui ne l’est pas en raison de la multitude d’éléments à prendre en compte. Pour rendre la question plus concrète et plus pratique, nous avons traduit cette complexité en six directives : moins de viande, agriculture durable, relations commerciales équitables, alimentation locale et de saison, poisson durable et lutte contre le gaspillage alimentaire. Une alimentation saine et délicieuse, bonne pour l’humain, l’animal et la planète : tel est notre objectif. »
IFDD : Quels sont vos projets en tant que SDG Voice ?
Hannelore Tyskens : « Si un large groupe de personnes sont tout à fait conscientes de l’impact social et écologique des choix que, en tant que citoyens, nous posons tous à la maison, au restaurant ou au magasin, elles ne parviennent pourtant pas toujours à agir en conséquence – il suffit de jeter un œil sur nos tickets de caisse. Avec notre campagne « Ik ben meer dan een kassaticket » (« Je suis plus qu’un ticket de caisse »), nous leur donnons une voix. Nous engageons une discussion avec les supermarchés à propos de préoccupations qui ne se reflètent pas sur notre ticket de caisse, et nous leur demandons de l’aide. Ensemble, nous essayons de trouver des solutions pour que le choix le plus durable devienne aussi le choix le plus évident.
Tout au long de l’année, nous allons organiser en Flandre des lieux de rencontre en ligne et hors-ligne pour permettre aux consommateurs de rencontrer une personne issue du supermarché local, un agriculteur, un collaborateur des pouvoirs publics… afin de discuter au sujet de l’alimentation durable et des limites concrètes auxquelles nous sommes tous confrontés lorsque nous faisons nos courses.
Dans ce cadre, pour donner la parole à un maximum de consommateurs, nous collaborerons avec une série d’organisations qui comptent de nombreux membres : Test Achats, la Gezinsbond, KVLV, Femma, Landelijk Gilden et Fairtrade Belgium.
« Nous ne voulons pas absolument tout mettre sur le dos des supermarchés, le problème est également de notre responsabilité. Quand on est fort occupés, on se laisse toujours séduire par l’option facile. Cela ne doit cependant pas nous empêcher de faire entendre notre voix. La consommation durable ne peut pas être difficile. Elle devrait être le choix le plus évident. »
IFDD : Qu’est-ce qui retient les supermarchés de devenir plus durables ? Et les consommateurs de faire des choix plus durables ?
Hannelore Tyskens : « La Belgique compte cinq grandes chaînes de supermarchés dans lesquels la majorité des consommateurs font le gros de leurs courses alimentaires. Donc, environ 80 % des consommateurs belges font leurs courses dans une poignée de chaînes de supermarchés. Ces chaînes de supermarchés pourraient donc potentiellement toutes nous donner un coup de pouce dans la bonne direction (grâce à la place des produits dans les rayons du magasin, leur étalage, l’utilisation de techniques de marketing sur les produits durables, ou même en rendant progressivement plus durable l’ensemble de leur offre).
Cela pourrait sembler n’être qu’une question de bonne volonté, mais ce n’est évidemment pas si simple. Toute la bonne volonté du monde n’est rien face à la dure réalité économique : tant que les clients ne s’expriment pas explicitement (par leurs choix en magasin) en faveur de produits plus durables, un distributeur ne prendra pas le risque de perdre ces clients. Et ces chiffres durs indiquent que la plupart d’entre nous achète de temps à autre du bio ou des produits issus du commerce équitable, et que, pour le reste, nous nous laissons surtout guider par le prix/la qualité et éventuellement par la santé. Avec la campagne Ik ben meer dan mijn kassaticket, nous entendons prouver que ces chiffres ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Si les chiffres permettent de voir ce que nous achetons, ils ne révèlent pas toujours ce à quoi nous accordons de l’importance en tant que citoyens ni les domaines où nous aurions simplement besoin d’un petit coup de pouce.
Il est donc grand temps d’envoyer un signal clair aux supermarchés, d’une autre façon. Sans vouloir absolument tout mettre sur leur dos, parce que c’est également à nous d’agir. D’une certaine façon, nous sommes peut-être tous hypocrites. Mais notre préoccupation est sincère. D’où l’intérêt de créer cette discussion. »
IFDD : Pourriez-vous donner quelques astuces pratiques aux consommateurs pour effectuer des achats plus durables ?
Hannelore Tyskens : Les petits et grands efforts envisageables sont nombreux. Nos six directives peuvent sans doute déjà quelque peu éclairer votre lanterne. Dès que possible, j’essaierais de changer une série d’habitudes fixes ; et cela peut être très simple. En achetant proportionnellement moins de viande, on ne doit même pas adapter le menu. En faisant une liste, on évite d’acheter trop et d’ensuite jeter beaucoup (ce n’est pas seulement mauvais pour la planète, ça l’est aussi pour le portefeuilles). Lorsque l’on parvient à transformer de petits gestes en habitudes, ils ont plus d’impact. Après quelques temps, un tel changement ne représentera plus un gros effort et on pourra ainsi essayer d’autres choses : est-ce que c’est également envisageable sans viande ou même sans produits laitiers ? Pourquoi ne pas essayer les fruits à coque ? Et quels produits étaient de saison, encore ? Il se peut que certaines choses deviennent plus vite une habitude que d’autres.
Ne vous inquiétez surtout pas trop de votre (in)cohérence. Et, quoi qu’il en soit : faites entendre votre voix. Même – voire peut-être surtout – si vous n’y arrivez pas toujours. La consommation durable ne doit en effet pas être difficile. Elle devrait être le choix le plus évident. »
*Le projet « SDG Voices » est une initiative de l’Institut fédéral pour le Développement durable (IFDD). En 2016, la ministre de l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable a donné le feu vert officiel à la campagne SDG Voices Belgium. À l’image de ce qui se fait à l’étranger, chaque année, un certain nombre d’organisations sont élues porte-paroles des SDG. En 2019, six nouvelles organisations – Via Don Bosco, Ubuntu Festival, Janssen Pharmaceutica (J&J), Hidrodoe, Fairfin et Rikolto – portent fièrement ce titre. Nous vous présentons chaque jour une de ces nouvelles SDG Voices. Tenez bien à l’œil notre site Internet et nos médias sociaux !*